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Pierre Calame : Une nouvelle étape pour la gouvernance de l'Europe
(juin 2000)
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Dans la construction européenne, un dispositif a eu une grande efficacité pendant quarante ans : la Commission a le monopole de la proposition et le Conseil des Ministres, celui de la décision. C'est ce que Georges Berthoin appelle le mécanisme de l'extranationalité. Il a l'avantage de concilier la prise en compte d'un bien commun sans s'attaquer de front à l'épineuse question de la souveraineté des Etats-Nation.

Malheureusement ce dispositif connaît une triple crise : de légitimité, de transparence et de cohérence. On peut appliquer à la gouvernance européenne toute la réflexion menée sur la gouvernance mondiale en ce qui concerne les principes fondateurs. Voici une série de propositions qui permettrait de relancer la gouvernance européenne sur de nouvelles bases tout en conservant ce qui fut la source de son efficacité depuis son départ.

1) Garder le monopole de propositions de la Commission mais transformer radicalement les mécanismes d'élaboration des propositions.




La séparation du pouvoir de proposition et du pouvoir de décision est plus moderne que jamais. Plus les sociétés sont complexes et plus le rôle de pouvoir de proposition est essentiel. A l'heure actuelle, les mécanismes de proposition de la Commission sont enfermés à l'intérieur de la sphère politique et sont largement confidentiels, donnant une importance exagérée au lobbying notamment économique, ce qui contribue à la perte de légitimité. Dans son rôle de propositions, la Commission devrait prendre l'initiative de l'organisation de débats démocratiques, faisant une large place à la société civile sans pour autant lui conférer une représentativité démocratique qu'elle n'a pas. L'exemple des Conférences de consensus montrent comment les termes du débat démocratique peuvent être renouvelés en profondeur. Il ne s'agit pas de supprimer les lobbies mais au contraire de faire en sorte qu'ils s'expriment au grand jour et non dans le silence des bureaux et des cabinets.

 

2) La révision des politiques fondatrices


Le meilleur exemple en est la Politique Agricole Commune (PAC). Elle a joué un rôle fondamental dans la construction de l'Europe et absorbe 50% du budget européen mais, depuis sa mise en place, les termes du problème ont changé de façon radicale mais l'Union, prisonnière des intérêts investis, des Etats et des groupes de pression, ne s'est pas montré capable de remettre à plat cette politique. Ce n'est plus une politique agricole dont a besoin l'Europe mais d'une politique des espaces ruraux. Cette mutation ne peut se faire sans le renouvellement décrit ci-dessus des mécanismes d'élaboration des propositions.

3. Des directives ŕ la subsidiarité active


Après l'échec de la communauté européenne de défense, qui a failli ruiné la construction européenne, l'Europe s'est construite par son unification économique. Celle-ci passe par la construction d'un espace économique homogène, par l'unification des conditions de concurrence. La directive européenne est devenue le modèle de l'intégration économique et politique. Efficace dans un premier temps, cette démarche est maintenant devenue contre performante car elle unit ceux qui pensent qu'il n'y a pas assez d'Europe (une Europe réduite à un grand marché) et ceux qui pensent qu'il y a trop d'Europe (une Europe régentant dans le détail la vie quotidienne au détriment des spécificités nationales et régionales. Pour construire une Europe à la fois plus unie et plus diverse, il faut changer de registre et cela ne semble possible qu'en généralisant le principe de subsidiarité active et en l'appliquant de proche en proche aux différents niveaux de territoire. Le Sommet du Luxembourg sur les politiques de l'emploi a été précurseur mais sa nouveauté même est le potentiel de changement qu'elle recèle semble mal évalué à Bruxelles.
On notera en particulier que le débat sur le fédéralisme, relancé par le gouvernement allemand par la bouche de son Ministre des Affaires Etrangères "parlant à titre personnel" a le mérite de souligner la nécessité de faire un pas en avant dans al construction politique européenne mais l'inconvénient, de mal poser le problème : le fédéralisme renvoie à un partage des responsabilités entre le niveau européen et le niveau national alors que l'enjeu est de construire une responsabilité partagée de plusieurs niveaux de gouvernance.

4. De la charte des droits fondamentaux à la charte de l'Europe pour un monde responsable, pluriel et solidaire



Un grand débat est en cours sur la charte des droits fondamentaux européens en même temps que l'Europe se constitue de plus en plus visiblement en citadelle assiégée face à la pression de l'immigration en provenance des autres continents. Ce n'est pas à travers le simple énoncé des droits que peut se constituer un projet de civilisation européenne mais par l'énoncé des droits et responsabilités pour chaque résident de l'Union Européenne et pour l'Europe vis à vis du monde.

5. Elargissement de la légitimité politique de l'Europe


La Commission Européenne affronte une crise de légitimité dans son pouvoir de proposition mais les gouvernements affrontent une crise analogue et l'élargissement du rôle du Parlement européen n'est pas suffisant pour répondre à cette crise. Ne faut-il pas songer, comme on l'évoque aussi pour la gouvernance mondiale, à des formes renouvelées de participation des parlements nationaux au débat sur les grands sujets de l'Europe?

 

   

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