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  Propositions citoyennes pour l'OMC    
 


Propositions citoyennes pour l'OMC*



Citoyens et citoyennes soucieux de l'intérêt général, nous adressons aux responsables politiques et à tous les membres des sociétés civiles qui se sentent responsabilisés, les éléments d'analyse et les propositions qui suivent.

Nous considérons que les instruments et les lieux de régulation des échanges mondiaux sont importants. Nous ne sommes pas favorables à une “loi de la jungle” seulement nuancée par des accords bilatéraux. Nous considérons que l'OMC doit être profondément réformée pour devenir cohérente avec des principes partagés par les êtres humains de la planète :
- principe de sauvegarde afin de transmettre une planète vivable aux générations futures,
- principe d'humanité et de dignité de chaque être humain,
- principe de responsabilité pour chacun et pour chaque entité organisée, afin d'assumer sa contribution à la construction d'une harmonie entre les sociétés, entre les hommes et avec leur milieu,
- principe de prudence et de précaution, afin que les sociétés humaines ne mettent en oeuvre de nouveaux produits ou de nouvelles techniques qu'une fois acquise la capacité d'en maîtriser les risques présents et futurs,
- principe de diversité des cultures et des êtres vivants, car la diversité est un bien commun qu'il est un devoir de préserver,
- principe de citoyenneté, car tous les êtres humains sont membres à part entière de la communauté humaine.
Le marché ne peut pas devenir la valeur suprême de l'humanité ! Il peut être orienté et gouverné par ces principes. Ceux-ci doivent être traduits par des orientations claires : le respect et la mise en œuvre des droits de l'homme, le droit des peuples à se nourrir et à choisir leur alimentation, la reconnaissance de la biodiversité comme patrimoine de l'humanité, le refus du bretetage des êtres vivants... Nous faisons également les propositions suivantes :

1. Il faut évaluer les accords du cycle d'Uruguay en fonction des objectifs et des critères de développement durable. On nous parle des bienfaits de la marche forcée vers la libéralisation de l'économie mondiale, mais les évaluations existantes ne font référence qu'à la croissance économique, ce qui est insuffisant. Les objectifs figurant dans le préambule des statuts de l'OMC, qui font référence au développement durable et sont précisés dans l'Agenda 21 et dans d'autres textes des Nations Unies, doivent être au centre d'une telle évaluation. Nous, citoyens, observateurs attentifs des réalités de ce monde, avons constaté les dégâts opérés par cette libéralisation forcée, conduite par les responsables politiques, soutenue par les multinationales et mise en oeuvre par l'OMC, le Fonds Monétaire International et la Banque Mondiale. Le monde s'est globalement enrichi mais les écarts se sont creusés entre riches et pauvres. On a dit que le commerce servait la paix. On constate qu'il n'a servi la paix qu'entre les nantis et qu'il a souvent conduit à des pratiques incompatibles avec le développement durable.
La réduction des disparités et des inégalités, la démocratie économique et la protection des ressources naturelles doivent être au centre des règles de l'OMC. Il est indispensable que celles-ci précisent à quelle définition du développement durable et à quelles conventions internationales elles font référence.

2. Convergence et cohérence pour un développement des échanges mais le refus d'une libéralisation plus grande. Les responsables politiques et les Etats signent des conventions sur le respect des droits de l'homme et sur la protection des ressources naturelles en mettant souvent en œuvre des politiques contradictoires. Les institutions internationales se dirigent souvent dans des directions différentes. Par exemple, les politiques d'ajustement structurel impulsées par le Fonds monétaire international ont conduit la plupart des pays en développement à libéraliser leur agriculture davantage que ne l'exigeait l'OMC. Il n'y a pas recherche de convergence, de cohérence et de cohésion. Ceci génère un coût énorme pour l'humanité. Des experts estiment que ces incohérences représentent 10 % du produit brut mondial. La recherche de convergence et de cohérence doit constituer une priorité par rapport à l'objectif d'une libéralisation accrue que nous refusons. Nous proposons, en particulier, que les règles et les accords de l'OMC soient liés et rendus compatibles avec les accords multilatéraux sur l'environnement et avec les autres règles, conventions définies et gérées par différentes instances internationales (Bureau international du travail, FAO, Nations Unies), comme ils le sont avec le Codex Alimentarius qui définit les normes en matière de produits alimentaires.

3. La réforme du système de règlement des litiges pour plus d'équité. Un système de règlement des litiges existe dans le cadre de l'OMC. C'est une bonne chose. Mais ce système est encore inéquitable et injuste, donnant le pouvoir aux puissances économiques et souvent, en sous main, aux multinationales. Il est inaccessible aux pays en développement car chaque recours coûte excessivement cher. Lors d'un conflit, la sanction ne peut être appliquée que par le pays plaignant : encore faut-il avoir des échanges économiques suffisants pour appliquer une rétorsion. L'afflux des plaintes et le harcèlement américain sont le signe du manque de clarté et de pertinence des règles actuelles. Ce sont les raisons pour lesquelles nous proposons les réformes suivantes :

  1. clarification (renégociation si nécessaire) des règles de l'OMC pour qu'elles acquièrent un caractère dissuasif et moins ouvert à l'interprétation.
  2. Composition des panels : professionnalisation des panelistes qui, en règle générale, ne sont pas des experts juridiques. Recherche de neutralité et d'objectivité.
  3. Un système de règlement des litiges avec “sanction collective” pour que la perte de concessions représente un coût économique suffisant pour obliger les pays développés à appliquer la décision du panel.
  4. Transparence
  5. Audition de tierces parties, y compris ONG (modifier l'article 10) et possibilité pour les ONG et les experts d'apporter des éléments supplémentaires.
  6. Création, à terme, d'un tribunal international du commerce et des échanges, indépendant, se référant aux textes fondamentaux des Nations Unies (dont la déclaration universelle des droits de l'homme), aux conventions internationales et aux accords de l'OMC.


4. L'accession de nouveaux pays dans des conditions acceptables. Quelle est la définition de la démocratie économique que partagent les 134 pays membres de l'OMC alors qu'ils laissent à la porte 35 pays qui représentent plus d'un cinquième de la planète ? Les conditions d'accès sont beaucoup trop complexes et le processus d'adhésion inique : on exige des conditions d'ouverture de marché supérieures aux engagements des membres de l'OMC et cela sans réciprocité. Le risque majeur est une déstabilisation économique et sociale de pans entiers de l'humanité. Une crise en Chine liée à une ouverture brutale des frontières, en particulier sur l'agriculture, aurait des conséquences considérables pour ce pays et au niveau international. Il faut donc définir des conditions objectives et équitables et ne pas laisser chaque pays postulant “défendre sa peau” sans base juridique.

5. La création d'un observatoire de l'OMC et de la régulation des échanges internationaux. Le principe est admis : l'OMC doit mettre en place des moyens de concertation avec les ONG, les organisations citoyennes et populaires. Mais le mécanisme structuré de consultation n'existe pas. Il est nécessaire qu'il soit élaboré et mis à l'épreuve dès le prochain cycle de négociations. La société civile devrait être particulièrement impliquée dans la création et le fonctionnement d'un observatoire international et d'un système d'information et de conseil. De nombreuses ONG et organisations citoyennes demandent un moratoire pour le lancement de nouvelles négociations. Un observatoire international, au fonctionnement autonome, reconnu par l'OMC, pourrait évaluer les effets des mesures prises, les mettre en débat et finaliser la mise en œuvre des engagements. Il devrait pouvoir se constituer “partie civile” lorsque des pratiques commerciales - même si elles ne font pas l'objet de plaintes de la part des pays concernés - vont à l'encontre des règles et de l'objectif de développement durable.

6. Un centre de ressources international. Sur les 134 pays membres de l'OMC, 80 ne seront pas en mesure, pour des raisons de compétences et de moyens techniques, de participer au prochain cycle de négociations dans des conditions satisfaisantes. Il est urgent de mettre en place un centre de ressources accessible à la société civile ainsi qu'aux administrations des pays membres ou non membres de l'OMC. Celui-ci fournirait les évaluations portant sur l'impact réel et potentiel des accords et des engagements, donnerait informations et formations sur les règles, offrirait des conseils en matière de négociation et proposerait une assistance juridique.

Sans volonté de situer l'OMC dans un cadre de valeurs et de principes, sans une définition claire des objectifs poursuivis et en l'absence de règles de fonctionnement démocratiques, les discussions engagées aboutiront à terme à la déstabilisation des sociétés et à l'aggravation des problèmes écologiques. Nous ne doutons pas que, face à cette perspective, l'émergence d'une opposition mondiale à la logique du libre-échange ne pourrait que provoquer un blocage des négociations...
Pour signer ce texte : propositions.omc@globenet.org ou : http://www.sentenext1.epfl.ch/fph/french.wlproj/apm.html

Vous pouvez télécharger ce texte pour la faire signer.

Premiers signataires
Marcel Marloie (France),
Gustave Massiah (France),
Fernando Rosero (Equateur),
Antonio Onorati, CROCEVIA (Italie),
Markus Luthi, REED (Suisse),
Van Brand (Pays Bas),
Monika Koubrakova (Bulgarie),
Association SOLAGRAL (France),
Candido Grzybowski, IBASE (Brésil),
Dimitris Goussios (Grece)
Moreau (Argentine),
Jacques Berthomé, CIEPAC (France),
Scialabba (Italie),
Debailleul (Canada),
Pierre-Yves Guihéneuf, Geyser (France)
Alistair Smith, Banana Link (Grande Bretagne),
Hamilton (États-Unis),
M. Segbenou (Côte d'Ivoire),
Sophia Murphy, IATP (États-Unis),
Lehman (États-Unis),
The Tuan (Vietnam),
Nacera Aknak Khan (Inde),
Michel Merlet (France),
Meredyth Bowler Allioud (France),
Joseph Rocher, RONGEAD (France),
Pierre Vuarin (France),
Joseph Racapé, MARS (France),
Rose-Marie Didonato, RONGEAD (France),
Dabrowski (Pologne),
Norman Messer (Italie)