Des
« mapeadores » au FSM
l’expérience d’une valorisation cartographique
de débats
Véronique Rioufol, avec la contribution des «
mapeadores »
Valoriser les débats du FSM
Depuis la première édition du FSM
en 2001, les organisateurs s'efforcent d'accentuer sa dimension
propositionnelle et de rendre visible la richesse des débats,
échanges et expériences qui s'y tiennent. En préparation
au FSM 2003, ils ont ainsi demandé aux panélistes
d'envoyer un texte préalable présentant leurs principales
réflexions, propositions de changement et stratégies
de mise en œuvre. Les responsables d'ateliers devaient, quant
à elles-eux, envoyer une information détaillée
sur le contenu et les objectifs de leur atelier.
Suite
à des contacts noués en novembre 2002 Forum Social
Européen entre Cândido Grzybowski (Ibase) de l'équipe
d'organisation du FSM et des membres de la FPH et de l'Alliance,
une petite équipe de membres et partenaires FPH/ Alliance
est mise sur pied: beaucoup de Français, mais aussi un
Espagnol, un Chilien, une Argentine ? Une quinzaine de personnes
qui, à travers une série de réunions de travail
et d'échanges électroniques et par l'utilisation
d'outils en ligne, élaborent et mûrissent collectivement
les objectifs et les modalités d'un travail de valorisation
du contenu des activités du Forum.
« L'Equipe de systématisation
»
Un premier groupe part début janvier à
Rio pour s'intégrer à la petite équipe d'Ibase
qui, au Brésil, est déjà à pied d'œuvre,
prémisse d'un important dispositif:
- une quinzaine de personnes sont chargées de rédiger
des synthèses textuelles des panels;
- une trentaine de personnes "couvrent" des ateliers;
- une vingtaine de "spécialistes" s'attachent
à un thème ou une question particulière;
- l'équipe FPH/ Alliance –les "mapeadores"-
est chargée d'utiliser la cartographie pour offrir un aperçu
des visions, propositions, stratégies et acteurs mis en
avant dans les contributions écrites des panélistes,
faire apparaître les convergences et divergences entre intervenant-e-s
d'un même panel et dégager les questions innovantes.
Elle cherche aussi à rendre visible la diversité
des thèmes traités dans les ateliers, et les connexions
entre ces thèmes.
Le travail de toute cette "equipe de sistematização"
poursuit 2 grands objectifs:
* encourager un dialogue constructif entre les participant-e-s
du FSM, en favorisant non un simple échange de vues mais
une confrontation des visions, propositions et stratégies
qu'elles-ils incarnent. Le dernier jour du Forum ont ainsi lieu
des "panels finaux" visant à mettre en commun
et confronter les propositions et perspectives s'inscrivant dans
chacun des 5 axes de travail du FSM.
* mettre à disposition du plus grand nombre (participants,
médias, grand public) les réflexions et expériences
échangées pendant le FSM, à travers le site
Web et un document qui sera publié courant 2003.
Arrivés à Porto Alegre, nous nous
fondons dans l'incroyable "ordre désorganisé
ou a-organisé" de l'équipe d'organisation –
une cinquantaine de personnes pour un événement
de 2000 activités réunissant 100 000 personnes sur
5 à 6 lieux dans la ville: fluidité, disponibilité,
adaptation, coopération et gentillesse sont indispensables
pour que tout fonctionne "en sintonia", comme disent
les Brésiliens, et que le Forum soit un tel succès
!!!
Le travail réalisé sur les panels
En partenariat avec le reste de l'équipe
de systématisation et les animateurs de panels, les mapeadores
couvrent les axes "principes et valeurs, droits humains,
diversité et égalité" (2) et "pouvoir
politique, société civile et démocratie"
(4).
Pour chaque texte reçu avant le début
du Forum, une carte "panéliste" est réalisée
et, pour chaque panel, une carte faisant apparaître les
thèmes traités, les points de convergence et de
divergence et les questions innovantes. Pour réaliser ces
2 types de cartes, l'équipe a donc mis au point plusieurs
types de "fonds de carte", distincts de ceux utilisés
antérieurement par la FPH, pour les adapter aux débats
du FSM et à la grille de lecture qu'on souhaite utiliser.
Les fruits de l'analyse réalisée
grâce à la cartographie sont communiqués aux
responsables de la synthèse textuelle qui l'intègrent
dans leur document. Tout ce travail de synthèse est fourni
aux animateurs des panels et de l'axe; il est intégré
dans les débats du panel de mise en commun le dernier jour.
Rendre visible le contenu des ateliers
Côté ateliers, un long travail d'indexation
est entrepris. La liste des mot-clés proposés par
les organisatrices-eurs de chaque atelier est retravaillée,
uniformisée et traduite, puis un second travail de ré-indexation
est entrepris à partir des résumés des fiches
d'inscription. Ce patient travail d'homogénéisation
et d'enrichissement endogène de la liste a permis d'aboutir
à une liste d’un millier de termes pour 1200 ateliers.
Une analyse, encore superficielle, de ce travail
fait ressortir nombre d'éléments intéressants:
certains thèmes de travail récurrents dans les ateliers
–tels que la spiritualité, la psychologie sociale,
les questions de genre– sont quasiment absents des activités
officielles; le néolibéralisme (en tant que tel)
est par contre rarement l'objet d'un atelier. Le mot-clé
le plus fréquemment employé est « développement
durable » puis, et c'est une surprise, « problématique
de genre ». Cette "découverte" sera largement
communiquée pendant le Forum et annoncée lors de
la conférence de presse de clôture.
Le travail d’analyse des contenus des ateliers
se poursuit actuellement. On sait à présent que
la majorité des ateliers peut difficilement trouver place
dans le découpage en cinq axes du Forum et que les thèmes
les plus importants sont, dans cet ordre : les économies
populaires, alternatives et solidaires, l’organisation sociale
(pour plus de justice), les problématiques de genre et
les droits des femmes, et enfin les identités et revendications
culturelles.
Un premier bilan…
Un premier bilan très positif peut être
dressé de cette expérience:
* l'équipe de mapeadores a réussi à définir
et mener à bien collectivement un projet cohérent
d'utilisation de la cartographie dans le cadre du processus FSM
;
* l'intégration à l'équipe de systématisation
a permis de construire un vrai partenariat avec les Brésiliens;
* la cartographie s'est révélée un outil
utile pour valoriser et systématiser les débats
des panels du FSM: elle invite à construire une grille
d'analyse pertinente; elle met en valeur des liens entre idées,
personnes et thèmes; elle s'appuie sur une base de données
et permet donc une recherche, un croisement et un affichage plus
aisés des données
* le travail de "systématisation" a gagné
en visibilité et en crédibilité
De nombreux progrès restent à accomplir
sur ce dernier point: nombre de panélistes n'ont pas envoyé
leur texte et la plupart l'ont fait très tardivement; certain-e-s
animatrices-eurs se sont montrés insensibles voire réticent-e-s
à tout effort de valorisation systématique des débats;
les panels de mise en commun n'ont pas permis une véritable
confrontation des visions et propositions, etc. Le travail de
l'équipe de systématisation, appuyé sur la
très forte détermination d'une partie de l'équipe
d'organisation du FSM, a cependant permis de faire un grand pas
en avant. Pour la première fois, des textes de panélistes
ont pu être mis sur le Web avant le début du Forum,
un espace a été offert pour la mise en commun et
la confrontation d'idées, les participants ont pu exprimer
leurs intérêts et priorités thématiques,
des animateurs se sont consacrés à un travail méthodologique,
les thèmes de travail des ateliers ont commencé
à bénéficier d'une (re-)connaissance publique,
une publication va être réalisée.
.. et des suites possibles
Cela nous permet de considérer avec espoir
et enthousiasme les prochaines étapes:
- la préparation du document de synthèse préparé
par Ibase pour mi-2003 pour regrouper des synthèses des
débats et expériences échangés pendant
le troisième FSM
- des documents FPH/ Alliance visant à capitaliser notre
expérience et à présenter, de façon
pédagogique, les usages possibles de la cartographie. Un
travail d'évaluation de l'expérience et de propositions
pour de futures collaborations va ainsi être menée
par toute l'équipe dans les mois qui viennent.
- et, nous l'espérons, une participation aux prochains
rendez-vous du FSM, à Saint-Denis en novembre pour le Forum
Social Européen et en Inde en 2004.
Véronique Rioufol, avec la contribution
des « mapeadores ».
Les mapeadores de l'équipe de systématisation
sont:
Saya Saulière, Georges Garcia, Françoise Feugas,
Sergio Escribano, Vladimir Ugarte, Delphine Astier, Marcela de
Grande, Juliette Decoster, Manola Rauss, Nicolas Haeringer, ,
Françoise Macé, Nicolas Sidi, Vincent Calame, Véronique
Rioufol
avec l'appui précieux de Gustavo Marin,
Pierre Vuarin, Laia Botey et Diego Escobar
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