Numéro 2 | Décembre 1998 | ||
Sommaire |
Mondialisation et Alliance des Peuples Sur quelques mouvements citoyens... Le contexte de la mondialisation oblige les acteurs de la société civile à inventer de nouvelles formes d'action et de coordination. Les défis se présentent tant au niveau national (interactions entre classes sociales et relations avec l'Etat) qu'international. Préfigurant certaines des formes d'action que pourrait prendre l'Assemblée des Citoyens de la Terre, voici quelques exemples actuels. L'Action de la Citoyenneté contre la Faim, la Misère et pour la Vie (Brésil) Cette action citoyenne débute en 1993, à partir du constat de l'étendue de la pauvreté dans ce pays (32 millions de personnes en situation de famine). Se basant sur les affirmations que " Démocratie et misère sont incompatibles " et que " Tout le monde est capable d'établir la carte de la misère dans son quartier " (Betinho), elle fait appel à l'initiative des secteurs les plus variés de la société, et tente de lier l'urgence à l'action sur les structures à moyen et long terme. Il ne s'agit ni d'un mouvement structuré, ni d'une organisation centralisée, mais d'un mouvement dynamique suivi par plus de trois millions de personnes articulant d'innombrables actions locales à un débat soutenu au niveau régional et national à travers des Forums. Tout cela a secoué la société et même si les résultats sont décevants sur le plan politique et de l'action du gouvernement fédéral, ils représentent un éveil de la société qui peut, sans doute à terme, modifier quelque chose au niveau des rapports sociaux et de la participation au développement. The National Alliance of People's Movements (Inde) Cette alliance, constituée à l'initiative de Medha Patkar, regroupe des mouvements rassemblant des groupes sociaux indiens vivant des ressources naturelles, ou marginalisés par une tradition millénaire et le type de développement économique actuel : femmes, intouchables, paysans sans terres, pêcheurs artisanaux, habitants des bidonvilles, populations tribales, etc. Lors d'une grande journée d'action en avril 1998, NAPM ne se contenta pas de dénoncer la Nouvelle Politique Economique, la construction de grands barrages ou le pouvoir des multinationales ou de l'Organisation Mondiale du Commerce, mais offrit des démonstrations d'autres façons de produire et de consommer (technologies indigènes, échanges local, modes de vie non-consuméristes, etc.) et appela à la création d'un nouvel ordre social fondé sur le pouvoir des peuples. Le mouvement zapatiste (Mexique) L'Armée Zapatiste de Libération Nationale (EZLN) représente une nouvelle forme de lutte politique en Amérique Latine. Cette armée de va-nu-pieds ne se propose pas de prendre le pouvoir. Depuis son apparition en 1994, elle a voulu simplement être un catalyseur du débat national sur les droits des indigènes, et plus généralement les droits des plus pauvres, tout en affirmant " Ca suffit ! - Ya basta ! ". Pour cela, elle entretient une relation étroite avec l'opinion publique et les médias. Cette caractéristique l'a transformé en symbole international de lutte des opprimés contre toutes les formes d'oppressions, anciennes et modernes, lui permettant d'organiser plusieurs rencontres 'intergalactiques' contre le néolibéralisme, en pleine zone de conflit. La signature des Accords de San Andrés laissait espérer une issue positive au conflit, mais l'armée reste présente dans les montagnes du Sud-Est du Mexique. Le Forum des Pauvres (Thaïlande) Pendant 77 jours (Mars-Avril 1997), en plein centre de Bangkok au niveau de la Maison du Gouvernement, 20.000 personnes se sont installées avec tentes et provisions. 121 groupes de protestation sont arrivés avec leurs familles pour revendiquer leur droits. Il s'agissait notamment de paysans pratiquant l'agriculture biologique, de pêcheurs dont les moyens de subsistance sont menacés, de populations vivant dans les bidonvilles de Bangkok, de populations indigènes expulsées, etc... Tous ces groupes étaient solidaires et coordonnés. Tous les matins, Ils pratiquaient la méditation pour unir leurs esprits avant d'envoyer leurs leaders à la maison du gouvernement. Le soir était consacré aux rencontres avec les groupes et entre leaders pour une mise au point. Des jeunes jouaient de la guitare et chantaient toute la soirée ou écoutaient les discours de leaders spirituels venus pour les soutenir et proner la non violence. Certains groupes ont obtenu gain de cause rapidement, mais l'ensemble du mouvement est resté soudé jusqu'à ce que tous les groupes aient vu reconnaître leurs droits. Le 'Forum des Pauvres' s'est terminé avec la promesse faite de revenir plus nombreux l'année suivante si les promesses obtenues du gouvernement n'étaient pas tenues. Ce qu'ils ont fait en Juillet 1998... Sommet des Peuples d'Amérique Convoqué en marge du sommet de Santiago (Chili, avril 1998) où les chefs d'Etat devaient lancer l'Aire de Libre Echange des Amériques. Le Sommet des Peuples d'Amérique a été une étape dans la construction d'une 'alliance sociale continentale intersectorielle' et l'élaboration d'une proposition alternative de développement par les mouvements syndicaux et populaires du continent. En marge de la réunion du G8 (groupe des nations les plus riches du monde), la New Economics Foundation (Grande Bretagne) a présenté avec l'appui du Sommet des Peuples une autre analyse de la croissance et une série de propositions : prise en compte dans l'analyse économique des "externalités" sociales et écologiques, reconnaissance des nouveaux mouvements économiques, et nécessité de mesures sur le plan international, dépassant le simple domaine financier pour inclure les dimensions sociales et écologiques. Association pour une Taxe sur les Transactions People's Global Action against
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