Numéro 5 | avril 2000 | ||
Sommaire |
Chantier Yin-Yang
L'atelier qui a eu lieu à New Delhi en Février 97 intitulé « Réconcilier le masculin et le féminin » a été l'étape fondatrice du chantier Yin Yang / Masculin-Féminin. Ayant conscience de la faiblesse de la participation féminine dans la dynamique de l'Alliance, il n'était pas question de mettre en place un groupe de femmes comme il en existe tant pour rééquilibrer un effectif. Nous voulions dépasser le cadre du ghetto « Gender » injustement réservé aux femmes comme catégorie socialement dominée - ghetto dans lequel elles sont confinées en victimes éternelles. Nous avons donc proposé de créer un espace de réflexion et de dialogue ouvert aux hommes et aux femmes intéressé(e)s par la transformation du rapport homme-femme et ses implications dans la transformation sociale en général. Cela signifiait à la fois la mise en commun du regard que portent les femmes sur leur condition dans la société mais aussi celui des hommes sur la manière dont ils vivent également leur condition d'hommes. Encore plus important pour nous était de croiser ses réflexions et d'élaborer une vision de la société et des propositions construites par des hommes et des femmes. Nous étions convaincus de l'importance d'associer les hommes à la réflexion dès lors qu'ils sont conscients que l'émancipation des femmes passe aussi par la libération des hommes du modèle masculin dominant. Pour pouvoir déconstruire ces modèles et s'en affranchir, il y a encore tout un effort d'écoute et surtout de remise en question personnelle à faire entre hommes, entre femmes et entre hommes et femmes. Trouver des nouvelles valeurs, changer les représentations, transformer les mentalités commence avant tout par la pratique personnelle et le dépassement des clivages classiques qui régissent nos modes de pensée d'essence profondément patriarcale. C'est ainsi que 15 hommes et 15 femmes de cultures différentes, suite à un échange préalable de témoi-gnages écrits se sont rencontré(e)s pendant une semaine et se sont livré(e)s à ce travail patient de réflexion et de construction de passerelles. Alors que le plus souvent, la question de la relation homme-femme reste cantonnée dans la sphère privée ou n'est discutée que dans des groupes généralement féminins ou masculins, les participants ont confronté leur vécu et leur expérience avec beaucoup de curiosité réciproque. Ce climat d'écoute et cette spontanéité dans l'expression relève tant de l'originalité de la démarche préparatoire que de l'envie, du besoin d'extérioriser, de partager, de mettre des mots sur des injustices et des peurs parfois vécues dans la solitude de son sexe. Ce voyage intérieur collectif nous a amené(e)s à comprendre la complexité dans laquelle nous évoluons. Nous avons réalisé à quel point construire notre identité en tant que femme et homme n'est pas chose facile. Plus encore, à quel point les tendances conservatrices patriarcales sont présentes ou menacent de resurgir dans la majorité des sociétés. Après avoir navigué tout au long de la faille qui sépare le féminin du masculin, le privé du public, l'individu de sa société, la tradition de la modernité et les hommes des femmes, un constat semble découler de ce parcours. Toutes ces dichotomies ne sont pas une fatalité mais une construction essentiellement sociale qui répondait peut-être à certaines priorités par le passé. Aujourd'hui elles semblent être à l'origine de grands déséquilibres aussi bien au niveau individuel que global. La volonté de changement est de plus en plus forte et partagée, elle marque un premier pas vers la transformation... [le rapport de l'atelier de New Delhi (112 pages en français, anglais et espagnol) est disponible auprès de la rédaction de Caravane] |