Numéro 4 | Octobre 1999 | ||
Sommaire |
CHARTE DE LA TERRE La vie internationale repose sur deux piliers fondateurs : la Déclaration universelle des Droits de l'Homme, qui met l'accent sur la dignité des individus et sur leurs droits ; la Charte des Nations Unies qui met l'accent sur la paix et le développement. Ces deux piliers ont permis des progrès incontestables et ont offert un cadre stable à la vie internationale mais ils se révèlent maintenant insuffisants, ne répondant pas précisément aux mutations que nous sommes en train de vivre. Ils comportent deux faiblesses majeures : reflet du rapport de force existant en 1945, ils sont enracinés dans les traditions occidentales et dans la vision de la modernité qu'avait l'occident à cette époque ; élaborés sur des bases philosophiques antérieures au prodigieux développement démographique, scientifique et technique, ils ne répondent pas aux défis qui résultent de ce développement. Historiquement, la recherche d'un complément à ces deux piliers remonte à la Conférence de Stockholm sur l'Environnement (1972). Là est née l'idée d'un troisième pilier : une Charte de la Terre régissant les rapports entre l'Humanité et la biosphère. Cette idée a été reprise lors du Sommet de la Terre de Rio de Janeiro en 1992, mais son approbation par les chefs d'Etat n'a pas été possible, aucun texte ne faisant consensus. Il y a maintenant deux processus parallèles d'élaboration d'une Charte de la Terre : l'un dans le cadre d'une initiative conjointe du Conseil de la Terre (créé par Maurice Strong) et de la Croix Verte Internationale (présidé par Mikhail Gorbatchev) lancée en réaction à l'impossibilité de faire aboutir une Charte de la Terre approuvée par les gouvernements ; l'autre dans le cadre du chantier de l'Alliance " Carrefours humains " mené en 1995 et 1996 dans les différents continents pour identifier les " dualités " communes aux différentes civilisations (voir le Chantier Carrefours Humains). Ces deux processus ont abouti pour l'instant à des textes sensiblement différents, malgré un effort constant de part et d'autre pour valoriser les points communs. La première différence concerne la structure de la Charte. Le chantier de l'Alliance pense que, pour constituer des critères concrets de choix susceptibles d'orienter les actions humaines et la vie internationale, la charte doit s'organiser autour de dualités majeures que nous avons découvertes communes aux différentes civilisations. De son coté, le projet de Charte de la Terre du Conseil de la Terre et de la Croix Verte Internationale s'en tient à l'énoncé de quinze principes servant de fondement à la gestion principalement écologique de la planète. La seconde différence tient au mode de discussion des projets. Notre sentiment est que l'on ne peut pas débattre véritablement d'une Charte de la Terre sans un processus de discussion et de proposition sur les autres mutations nécessaires pour préparer le XXIème siècle, et qu'elle doit également être prolongée d'une formulation plus opérationnelle par l'application des principes généraux à différents domaines de l'activité humaine (voir l'article). Le Conseil de la Terre et la Croix Verte Internationale, de leur coté, mettent en ouvre un processus de consultation limité à la Charte de la Terre, en vue de la soumettre à l'approbation de l'Assemblée Générale des Nations Unies en l'an 2000. Ces deux processus loin de se concurrencer, doivent se nourrir mutuellement. Pierre Calame |