Numéro 4 | Octobre 1999 | ||||||
Sommaire
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S.O.S. Mer et Pêche Les professionnels du secteur de la pêche en sont conscients : "de nombreux stocks de poissons sont surexploités ou à des niveaux critiques d'exploitation.". Certains pêcheurs ont mis en pratique ou recherchent encore des modes de gestion et de conservation de la ressource qu'ils élaborent souvent en collaboration avec leurs partenaires du secteur. Ces "expériences constructives" méritent de l'attention. Pour répondre aux problèmes de gestion de la ressource, les solutions adoptées par les pêcheurs sont toujours adaptées à un contexte bien précis. Elles tiennent compte de très nombreux facteurs comme : les zones de pêche, les flottilles, les techniques utilisées, les saisons, les coutumes, les espèces ciblées ou les marchés. Leur réussite est souvent garantie par un accord de tous les acteurs impliqués de la filière ou de la sous-filière s'il s'agit d'une initiative locale. Les administrations comme les instituts de recherche ou les centres de formation apportent eux aussi un appui concret dans certains cas. Les expériences réussies sont heureusement de plus en plus nombreuses. Les chaluts de fond, souvent cités comme exemple de technique de pêche destructrice font l'objet de nombreuses études menées par les Instituts de recherche afin d'augmenter leur sélectivité. Certaines recherches ont déjà abouti à des résultats concrets et sont adoptées par les professionnels. Ainsi au Royaume-Uni, l'utilisation de la "maille carrée" est dores et déjà adoptée par les patrons de chalutiers. En Bretagne, en France, la mise au point des "grilles à lottes" est sur le point d'être finalisée par les chercheurs de l'Ifremer en collaboration étroite avec les professionnels d'une organisation de producteurs. Ces deux dispositifs permettent de réduire considérablement les captures de juvéniles qui constituent une grande partie des prises accessoires rejetées en mer car invendables. Malheureusement, les processus de mise au point de ces engins sont très longs ; près de cinq ans pour la "grille à lottes". Il est donc important de favoriser le plus possible les échanges d'expériences. Les pêcheurs ont un don pour adapter et adopter une technique plus sélective ou une mesure de conservation lorsque ses caractéristiques leur conviennent. A la recherche d'une pêche responsable Les caseyeurs français et irlandais sont un des exemples. Le casier à crustacés qui est pourtant une technique de pêche sélective, n'assurait plus la préservation de la ressource. Chez les uns, le nombre de casiers embarqués par bateaux avait très fortement augmenté sans pour autant améliorer les captures - la commission crustacés du comité régional des pêches de Bretagne avait avancé le chiffre de 2400 casiers sur un seul bateau - chez les autres les prises ne cessaient de diminuer. Ils sont donc allés chercher des idées de l'autre côté de l'Atlantique sur la côte Est des Etats-Unis et du Canada où des communautés de pêcheurs de crustacés au casier ont depuis bientôt vingt ans mis au point différentes méthodes de gestion et de conservation du stock de homards. Les excellents résultats obtenus à tous les niveaux par les pêcheurs d'outre Atlantique ont surpris puis fini par inspirer leurs "collègues caseyeurs" des côtes européennes. Après leur voyage d'étude, les Irlandais ont choisi de mettre en place un mode de conservation basé sur le poinçonnage des femelles grainées. Tout individu ainsi marqué étant définitivement interdit à la vente ceci permet de constituer en peu de temps un stock considérable de "génitrices protégées". Les Français ont eux adopté l'idée du "baguage des casiers" pour contrôler le nombre de casiers par bateau. Tous les casiers embarqués doivent porter une bague numérotée depuis janvier 1997 et leur nombre devrait être limité à 200 par homme d'équipage, plafonné à 1000 par bateau, mais avec des aménagements pour tenir compte des petites unités qui travaillaient à deux hommes 600 casiers. Chaque partenaire a un rôle à jouer : les organismes de recherche pour certifier le bien fondé des mesures de conservation et leurs effets positifs sur les ressources, les centres de formation pour clarifier les objectifs et les avantages d'une pêche responsable, les administrations pour faciliter ces initiatives, et finalement les professionnels de la filière pour adapter et adopter un mode de pêche plus responsable. Il est donc essentiel de participer avec les professionnels à la recherche de solutions viables pour la conservation des ressources halieutiques, comme il est indispensable de collaborer dans ce sens entre partenaires du Nord et du Sud afin de trouver un juste équilibre pour assurer la survie de toutes les communautés liées à la mer. Alexis Fossi (France-Portugal)
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