Numéro 3 | Mai 1999 | |||
Sommaire
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Biodiversité, droits des communautés, et implications des Organismes Génétiquement Modifiés Un collectif local de l'Alliance composé de K. N. Tiwari, Directeur de Disha, association indienne engagée aux cotés des communautés rurales du nord de l'Inde dans la lutte contre toutes formes de discrimination sociale, du mouvement Save the Seeds et de Bharat Dogra, journaliste indépendant travaillant depuis une vingtaine d'années sur les questions liées aux transformations de la société rurale indienne, a pris l'initiative d'accueillir le troisième et dernier forum sur les OGM en agriculture soutenu par la FPH (voir Chantier Biodiversité). Cette rencontre, qui s'est tenue du 5 au 10 décembre 1998 à Rishikesh (Inde), se proposait de construire une réflexion interculturelle sur les Organismes Génétiquement Modifiés (OGM) en agriculture et leur impact sur les sociétés rurales des pays du Sud. Carine Pionetti retrace ci-dessous l'essentiel des débats. Nous reproduisons également la motion finale approuvée par l'ensemble des participants à l'issue de la rencontre. Si cet atelier, dernier volet d'une série de trois rencontres sur les OGM en agriculture, a eu lieu en Inde, cela ne tient nullement au hasard. L'Inde est de ces pays où l'agriculture paysanne prime encore et où le concept de "communautés rurales" conserve un sens profond. De plus, l'Inde est le lieu de multiples initiatives non seulement dans le domaine de la conservation de la biodiversité, mais aussi autour des droits des communautés ou encore du contrôle politique local. Voici donc une quarantaine de personnes venues d'Asie, d'Afrique, d'Amérique et d'Europe réunies au pied de l'Himalaya pour échanger leurs points de vue sur l'arrivée des OGM, sur l'appropriation des ressources génétiques et la pluralité des systèmes de savoirs. Les échanges s'avèrent, dès la première matinée, fructueux. On comprend que si, en Afrique, les OGM ne sont encore pratiquement pas apparus, la manipulation du vivant suscite des questionnements éthiques et moraux de fond, qui ont déjà largement été évacués dans les pays industrialisés. On réalise qu'au Népal, comme en Algérie, la question ne se pose pas en terme de "Oui" ou "Non" au OGM. Les populations rurales de ces pays se préoccupent plutôt d'optimiser leur production alimentaire, dans le seul but, souvent, d'assurer leur survie. On apprend avec stupéfaction que la firme Monsanto procédait, sans le consentement des fermiers, à des essais de culture de coton transgénique dans plusieurs Etats de l'Inde. Et, l'on réalise que la situation des agriculteurs des Etats-Unis, si elle est moins précaire, est cependant loin d'être enviable, car l'endettement est un fléau majeur. Le flou règne, et il ne fait qu'illustrer le manque de transparence qui entoure les OGM, aussi bien en Inde, qu'en France ou en Thaïlande. Les gouvernements ne transmettent à la société civile que des informations tronquées sur la question, se refusant à imposer des réelles mesures de sécurité sur les manipulations génétiques et la dissémination d'OGM dans l'environnement. Quant aux industriels, quel intérêt trouveraient-ils à la mise en place d'un climat plus transparent, qui pourrait les amener à être tenus pour responsables de leurs actes en cas de problème ? Il apparaît donc urgent non seulement de faire circuler une information récente et claire sur les OGM, les nouvelles biotechnologies, et l'industrie agro-alimentaire, mais aussi de développer, comme cela se fait au Népal, en Inde, au Zimbabwe, des systèmes de production qui soient viables et qui reposent sur les ressources et les savoirs locaux. D'où l'importance d'instaurer, parallèlement, des régimes de droits qui reconnaissent aux communautés leur capacité de gestion des ressources génétiques et favorisent la rémunération de leurs innovations. C.P. |